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Les influenceurs, nouvel enjeu des relations entre la France et l’Algérie

Les influenceurs, nouvel enjeu des relations entre la France et l’Algérie

Des ressortissants algériens arrêtés en France après des appels à la haine sur les réseaux sociaux, une expulsion bloquée par Alger, un système d’immigration en question… Les tensions s’accentuent entre la France et l’Algérie et les influenceurs y contribuent.

“Il faut brûler vif, tuer et violer sur le sol français toute personne qui s’opposerait au régime algérien”, ce sont les mots de l’influenceur Imad Tintin, suivi par plus de 400 000 personnes sur ses réseaux sociaux. Son procès se tiendra à Grenoble le 23 mai, pour appel à commettre des actes terroristes en France. Dans le même cas, Zazou Youssef, 25 ans, poursuivi pour avoir appelé sur TikTok à perpétrer des attentats en France et des violences en Algérie, a été condamné à 18 mois de prison ferme en février, assortis d’une interdiction du territoire français pendant dix ans.

En mars, Doualemn a été condamné à cinq mois de prison avec sursis, après la diffusion d’une vidéo sur TikTok appelant à « donner une sévère correction » à un opposant au régime algérien. Il avait pour cette vidéo été expulsé par la France début janvier, mais l’Algérie l’avait renvoyé vers Paris. Une décision reçue comme un camouflet par le gouvernement français.

Sofia Benlemmane, 54 ans, avait été condamnée à neuf mois de prison avec sursis le 17 avril 2025 pour avoir menacé de mort des opposants au régime algérien. Elle avait été interpellée début janvier, pour avoir mis en ligne des contenus haineux et des appels à la violence. Suivie sur TikTok et Facebook par plus de 350.000 personnes, cette femme sans emploi avait diffusé plusieurs vidéos, dont une où elle insultait en direct une autre femme. “Nique ta mère toi et ta France, lui avait-elle lancé. J’espère que tu seras tuée, j’espère qu’ils vont te tuer.”

Une diplomatie parallèle en ligne

Ces personnalités numériques, suivies par des millions de jeunes tant en France qu’en Algérie, ont fait basculer l’affaire diplomatique dans l’espace numérique. Cette nouvelle forme d’influence a pris une telle ampleur que Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, a déclaré : “L’Algérie cherche à humilier la France par des canaux parallèles, notamment via ces influenceurs”.

Face à cette montée en puissance, les autorités françaises semblent adopter une double stratégie : d’un côté, surveiller et sanctionner les comportements jugés problématiques ; de l’autre, éviter une instrumentalisation politique. À ce titre, des peines sont infligées : sursis, amendes, ou convocations judiciaires. Mais la visibilité publique de ces affaires oblige l’État à les traiter avec prudence, tout en tentant de ne pas provoquer une escalade. 

« Ils ont commencé à attaquer la France, certains opposants au régime algérien, ainsi que le Maroc et Israël. Leur rhétorique et leur mode opératoire rappellent des méthodes utilisées par les services de renseignement russes », analyse Khadija Mohsen-Finan, politologue, spécialiste du Maghreb et des questions méditerranéennes. Pour la première fois, des influenceurs apparaissent comme des éléments incontournables dans la gestion d’une crise entre deux pays. Leur prise de position sur les réseaux sociaux redessine les contours d’une diplomatie qui ne peut plus se contenter du langage feutré des chancelleries.

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